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Les financements de la recherche

Les financements de la recherche

Financement de la recherche universitaire : des solutions multiples

Les activités de recherche ont connu un important développement au cours des dernières années à l’Université de La Réunion et cet essor doit se poursuivre. Pour atteindre cet objectif, la diversification des sources de financement des projets est indispensable. Sans attendre l’inévitable réduction des aides issues du Fonds européen de développement régional, qui soutient largement la recherche réunionnaise depuis deux décennies, d’autres leviers publics ou privés peuvent être activés. Certains le sont déjà et financent plusieurs projets en cours : E-walking, Twinsolar, Tretzerbaj… Les enseignants-chercheurs peuvent s’appuyer sur la Direction du soutien à la recherche, innovation, valorisation et partenariats (Drive) pour faire aboutir leurs dossiers.

En 2022, l’Université de La Réunion a fait son entrée dans le classement de Shanghai, dans la catégorie des sciences de l’atmosphère. Cette première consécration illustre la progression des activités de recherche au sein de l’établissement, qui atteignent un niveau inégalé. « L’université a changé de dimension, souligne Patrick Mavingui, vice-président en charge de la Recherche et de la Valorisation. En quelques années, nous sommes passés de la 11ème à la 4ème place, dans la catégorie des universités moyennes, en nombre de publications scientifiques. D’importants investissements ont été réalisés pour structurer plusieurs domaines de recherche : la santé, l’agroécologie, l’observation des écosystèmes naturels… Le Fonds européen de développement régional (Feder), ainsi que son volet de coopération régionale, Interreg, ont joué un grand rôle dans cet essor ».
Ce sera encore le cas dans les prochaines années, le programme européen 2021-2027 demeurant très favorable à La Réunion, dans la logique de rattrapage du retard des Régions Ultrapériphériques. Mais à terme, le soutien communautaire est appelé à diminuer. « Nous devons perdre l’habitude de nous reposer systématiquement sur le Feder et chercher à actionner d’autres leviers, à commencer par Horizon Europe, en élaborant une stratégie cohérente de sollicitation des deux fonds européens, poursuit Patrick Mavingui. De plus, le fonctionnement du Feder implique de mettre en place des préfinancements avant de percevoir les aides, ce qui peut générer des difficultés de trésorerie. »
Horizon Europe a pris le suite du programme Horizon 2020 avec la même priorité donnée aux projets partenariaux entre universités européennes. De plus, le sous-programme dénommé « Widening », ouvert aux Régions Ultra Périphériques, offre des opportunités supplémentaires à la recherche réunionnaise. A travers plusieurs dispositifs, il apporte un soutien accru aux projets émanant de régions en retard de développement afin d’y attirer des chercheurs européens de haut niveau. Depuis la fin 2022, le Lacy (laboratoire de l’atmosphère et des cyclones) accueille ainsi un chercheur de l’Université de Catalogne qui constitue une équipe autour de son projet. L’Université de La Réunion a d’autre part déposé un projet de centre d’excellence en infectiologie et zoonoses dans le cadre de Teaming for Excellence, autre volet d’Horizon Europe.
« L’accès à ces financements implique de faire du benchmarking, de repérer les appels à projets dans chaque domaine, souligne Patrick Mavingui. Pour cela, les enseignants-chercheurs peuvent s’appuyer sur les compétences de la Drive (Direction du soutien à la recherche, innovation, valorisation et partenariats) mais aussi celles de services spécialisés d’autres universités, voire de cabinets rodés au traitement des dossiers européens ».
D’autres sources de financements sont susceptibles de soutenir les projets réunionnais de recherche. Elles peuvent provenir de l’Etat (Agence Nationale de la Recherche, plan d’investissement d’avenir France 2030), des collectivités mais aussi du secteur privé, quand des entreprises ont besoin de répondre à une demande ou de trouver une solution à un problème par la recherche. Des sessions d’information en direction des directeurs d’unité de l’université et des enseignants-chercheurs ont débuté afin de les familiariser avec ces questions, souvent éloignés de leur univers scientifique.

L’Université a changé de dimension, en quelques années, nous sommes passés de la 11ème à la 4ème place, dans la catégorie des universités moyennes, en nombre de publications scientifiques.

Patrick Mavingui, vice-président en charge de la Recherche et de la Valorisation.

A la Drive, deux services supports

A la Direction du soutien à la recherche, innovation, valorisation et partenariats (Drive) de l’Université de La Réunion, deux des services dédiés à l’accompagnement des enseignants-chercheurs sont spécialisés dans le montage de leurs dossiers. Le service Partenariats et valorisation cible en priorité les financements privés. Le service Ingénierie de projets est plutôt orienté sur les financements publics.

Certains projets de recherche ne demandent que du temps de cerveau disponible et un ordinateur. Dans la majorité des cas, ils exigent en revanche de trouver des moyens pour financer l’acquisition d’équipements, des frais de mission, des salaires de contractuels si les ressources humaines du laboratoire concerné sont insuffisantes… La plate-forme Open4Research, qui regroupe et actualise en permanence les appels d’offres nationaux, européens et internationaux, est un outil précieux pour guider les recherches de financement. Le recours à des compétences locales reste néanmoins fort utiles aux porteurs de projets. Elles se trouvent à la Direction du soutien à la recherche, innovation, valorisation et partenariats (Drive), dans deux services très proches l’un de l’autre.

Le service Partenariats et Valorisation, composé de Frédérique Noël et Marc Ramillien, est spécialisé dans le financement privé des projets, notamment à travers trois types de conventions. Les conventions de prestations de service pour un partenaire impliquent la réalisation d’une recherche dont les résultats deviennent la propriété du commanditaire. Les conventions de collaboration, plus fréquentes, mettent en commun les moyens de la recherche universitaire et ceux d’un partenaire « pour atteindre un objectif dont on ne sait pas s’il est atteignable », explique Marc. Enfin, plusieurs Conventions industrielles de formation par la recherche (Cifre) sont signées chaque année à La Réunion. Une entreprise recrute alors pour trois ans un doctorant dont le sujet de thèse est susceptible de contribuer au développement de son activité et doit avoir un caractère innovant, validé par l’Association Nationale de la Recherche et de la Technologie, qui finance une part majoritaire de sa rémunération.

Les recherches de financements publics sont plutôt menées par le service Ingénierie de projets, constitué de Françoise Heekeng, Juan-Manuel Mora-Rey et Claire Tessier. « Les sources peuvent être régionales, nationales,européennes ou internationales, détaille Claire. Nous accompagnons les enseignants-chercheurs à plusieurs niveaux : l’élaboration du budget et le montage financier, l’accompagnement administratif et, si besoin, la relecture de la présentation du projet afin de vérifier qu’il répond bien aux critères de sélection scientifique ».

Les deux services interviennent pour les 22 unités de recherche de l’université. « Nous sommes là pour faire gagner du temps aux porteurs de projet, attirer leur attention sur les risques, les points de détails dont ils ne sont pas familiers, afin de donner toutes les chances de réussite à leur dossier », résument Claire et Marc.

Contacts :
Service partenariats et valorisation et service Ingénierie de projets

Open4research

Le nouvel outil pour les recherches de financement ! 

Le service ingénierie de la recherche a pour mission d'accompagner les chercheurs dans la formalisation de leurs demandes de subvention mais également de les aider à identifier des financements. Dans cette optique, un nouvel outil de recherche de fonds a été déployé à l'Université. L’objectif de cet outil est de permettre  aux chercheurs de l’établissement d’acquérir une plus grande autonomie, ainsi, grâce à cette plateforme, ils peuvent accéder à une plus grande diversité de financement auxquels ils sont éligibles.

Open4Research fonctionne comme un moteur de recherche, il recense des appels à projet aux niveaux national, européen et international pour des fonds de tout type. Il cible de nouvelles sources de subventions pour les projets de recherche, de formation ou de valorisation. 

À l’avenir, l’Université espère pérenniser cet outil et de cette façon, améliorer la distribution et la variété des financements obtenus pour la recherche.

 

Contact : 
Ingénierie de projets
Plus d’infos sur la page d'open4research de l'Université.

e-Walking

L’innovation au service des personnes âgées

Soutenu par l’Agence Nationale de la Recherche, le projet e-Walking a pour but de développer une nouvelle solution biotechnologique afin d’améliorer la mobilité des personnes vieillissantes. Basé sur la stimulation électrique musculaire, il est porté par le laboratoire IRISSE et vise à concevoir un vêtement intelligent, avec capteurs embarqués.

Le laboratoire IRISSE (Ingénierie, Recherche, Intervention, Sport, Santé, Environnement) de l’université travaille depuis plusieurs années sur les sujets de la marche et de l’équilibre chez les personnes âgées. En février 2023, le laboratoire lié à la filière Staps, sur le campus du Tampon, a lancé un ambitieux projet qui a obtenu le soutien de l’Agence Nationale de la Recherche : e-Walking. Son but : mettre au point un système portable, de type pantalon gainant, avec capteurs embarqués pour stimuler les bons muscles au bon moment. « Nos recherches des années précédentes ont montré que les personnes âgées, pendant la marche, ont tendance à mobiliser davantage leur tronc, détaille Teddy Caderby, directeur d’IRISSE. Elles le balancent pour avancer, ce qui permet de moins solliciter les muscles du mollet qui  ont aussi moins de force du fait du vieillissement. Mais le tronc représente les deux-tiers de la masse d’un corps et en l’utilisant ainsi, les personnes âgées peuvent potentiellement augmenter les probabilités de chute. Notre projet consiste à renforcer l’action des muscles du mollet par des stimulations électriques, pour revenir à un schéma normal de marche ».
La stimulation électrique musculaire est déjà utilisée en kinésithérapie et en rééducation, pour soigner les conséquences d’un AVC, maintenir la musculature des paraplégiques et tétraplégiques... Le projet e-Walking a déjà démontré que la stimulation électrique des muscles du mollet pendant la marche, grâce à des électrodes posées sur des personnes jeunes, permettait d’augmenter la vitesse de la marche. Il s’attache maintenant à comprendre les effets de la stimulation électrique sur des muscles vieillissants et aussi à caractériser les différences au niveau de paramètres biomécaniques et physiologiques (consommation d’oxygène, activité musculaire, équilibre postural…) pendant la marche entre personnes jeunes et personnes âgées. Les chercheurs veulent vérifier une hypothèse : en mobilisant davantage leur tronc pendant la marche, les personnes âgées activent davantage les muscles des hanches et consomment davantage d’énergie, ce qui a une incidence sur leur stabilité et augmente les risques de chute.
Irisse mène ce projet, qui va durer cinq ans, avec le CHU de La Réunion, le laboratoire Motricité, Interactions, Performance de l’Université du Mans et le laboratoire de Simulation et Modélisation du Mouvement de l’Université de Montréal. Il pourrait aboutir à la conception d’un vêtement « intelligent », intégrant une batterie, des stimulateurs électriques et une centrale inertielle gérée par de l’informatique embarquée.

Le projet e-Walking est financé par l’Agence nationale pour la recherche (ANR-22-CE19-0009-01)

 

Contact :
Teddy Caderby, directeur du laboratoire IRISSE

 

Twinsolar

Synergie européenne au service de l’énergie solaire

Le laboratoire PIMENT (Physique, Ingénierie, Mathématiques pour l’Energie, l’eNvironnement et le bâtimenT) a obtenu un financement de l’Union européenne dans le cadre du  programme Horizon Europe pour lancer le projet Twinsolar. Avec une université danoise et un institut allemand leaders dans la recherche sur l’énergie, les chercheurs réunionnais vont travailler jusqu’en 2025 à affiner les prévisions de production des centrales solaires et à modéliser un mini-réseau d’énergie avec une forte auto-suffisance sur le campus de Terre-Sainte. Leurs résultats seront partagés avec les autres territoires insulaires européens.

Comment intégrer toujours plus d’électricité d’origine solaire dans le mix énergétique réunionnais ? Actuellement, EDF accepte un peu plus de 30% de puissance de sources intermittentes (photovoltaïque et éolienne) : au-delà, le risque de chute brutale de production provoquée par la couverture nuageuse, l’absence de vent ou un incident sur le réseau électrique mettrait en péril l’alimentation électrique de l’île. Deux solutions peuvent contribuer à augmenter la part du solaire : l’amélioration de la prévision de la production à très court terme, sur la base d’observations et de modèles météorologiques, et le développement de flexibilités telles que le stockage d’énergie et le pilotage de la consommation qui réduirait le recours au réseau.
Ce sont les deux sujets du projet Twinsolar, porté par le laboratoire PIMENT, qui a obtenu un financement de 1,5 million d’euros du programme Horizon Europe de l’Union européenne. « Il s’agit du premier projet de recherche européen coordonné  par l’Université de La Réunion avec des partenaires internationaux, souligne Chloé Durif, ingénieure d’études en charge de sa coordination. Twinsolar, qui se poursuit jusqu’en août 2025, va nous aider à structurer une méthodologie de gestion de projet à cette échelle ».
Le laboratoire PIMENT a reçu l’appui de l’agence de développement Nexa et d’un cabinet de conseil pour faire aboutir son projet, démarré en septembre 2022. Nexa est aussi partenaire de Twinsolar, en charge de la dissémination des connaissances à l’échelle régionale. La Commission des îles de la Conférence des Régions Périphériques et Maritimes y est également associée : les territoires insulaires européens, non interconnectés à des réseaux continentaux, sont intéressés au premier chef par les solutions concourant à l’autonomie énergétique.
Sur le plan scientifique, Piment a noué des partenariats avec l’institut Fraunhofer pour les systèmes énergétiques solaires, en Allemagne, et le DTU (Technical University of Denmark).  Une première visite d’experts réunionnais a été organisée en septembre 2022 en Allemagne et au Danemark. Des workshops et des visites impliquant des chercheurs des deux instituts européens se sont tenus à La Réunion en février 2022. Une école d’été est prévue en août 2023 au Danemark pour un groupe de chercheurs réunionnais.
« 30% des moyens de Twinsolar seront d’autre part investis dans la modélisation et le dimensionnement d’un mini-réseau intelligent sur la campus de Terre-Sainte, complète Chloé Durif, avec l’objectif d’atteindre 80% d’auto-suffisance en énergie solaire ».

 

Contacts :
Chloé Durif, cheffe de projet
Mathieu David, directeur du laboratoire PIMENT

TrétZerbaj

Valoriser la biodiversité qui soigne

TrétZerbaj, financé par le Plan Innovation Outre-mer (PIOM) de France 2030, fait appel à des compétences multidisciplinaires pour créer une « bibliothèque » d’extraits de plantes médicinales, identifier des techniques pour synthétiser rapidement les molécules actives anti-infectieuses utiles de la biodiversité réunionnaise et mieux rétribuer ceux qui contribuent à sa connaissance. Plusieurs unités de recherche de l’Université de La Réunion ainsi que des partenaires privés du tissu économique local contribuent à porter ce projet, qui a également l’ambition de créer une plate-forme de criblage à haut débit des extraits de plantes

On l’oublie trop souvent : 70% de la population mondiale se soigne, encore aujourd’hui, avec des plantes, et 60% des médicaments actuellement sur le marché sont d’origine naturelle, extraits d’une plante, d’un champignon ou d’une algue.

La Réunion, qui constitue avec les autres îles du sud-ouest de l’océan Indien un des hot spots de la biodiversité mondiale, abrite sa part de molécules potentiellement exploitables. L’unité mixte de recherche PIMIT (Processus Infectieux en Milieu Insulaire Tropical) a déjà démontré, lors de ses travaux antérieurs, l’intérêt de cette biodiversité dans le cadre de la lutte contre les maladies infectieuses émergentes. Avec TrétZerbaj, financé dans le cadre d’un appel à projets France 2020-Plan d’Innovation Outre-Mer, elle franchit aujourd’hui une nouvelle étape. Grâce à un financement de 2,6 millions d’euros sur quatre ans, apportés à 70% par l’Etat et complétés par le Conseil Départemental de La Réunion, le CNRS, le CYROI, l’Inserm, l’Université de La Réunion et Qualitropic), les chercheurs vont développer plusieurs axes de recherche en étroite collaboration avec les startups et des partenaires privés qui travaillent sur la biodiversité végétale. Les chercheurs spécialisés dans les maladies infectieuses vont notamment solliciter les compétences de l’Association Plantes Aromatiques et Médicinales (Aplamedom) de La Réunion et du laboratoire Icare (Institut coopératif austral de recherche en éducation) au sujet des usages locaux, via des enquêtes menées auprès des prescripteurs et des utilisateurs de plantes médicinales. 

« Le but principal du projet est de créer une extractothèque, c’est-à-dire une bibliothèque d’extraits de plantes qui sera hébergée au Cyroi, explique Chaker El Kalamouni, chimiste et biologiste, maître de conférences et directeur adjoint de PIMIT. Les plantes seront choisies en fonction de leur efficacité pharmacologique contre des maladies affectant spécifiquement le territoire réunionnais. Le deuxième grand axe de TrétZerbaj est la mise en place d’une plate-forme de criblage haut-débit des substances naturelles anti-infectieuses présentes dans les plantes. L’acquisition de cette technologie de pointe, qui existe à quelques exemplaires seulement en France, consommera d’ailleurs une part non-négligeable du budget total du projet.

La disponibilité de l’extractothèque et de cette plateforme robotisée pourraient permettre, in fine, de répondre très rapidement à l’émergence d’une maladie infectieuse. L’élaboration par le laboratoire CEMOI d’un modèle économique de valorisation de la biodiversité locale et des connaissances à son sujet, dans le respect du protocole de Nagoya sur le partage des ressources génétiques, fait également partie du projet.

 

 

Contact :
Chaker El Kalamouni, maître de conférences et directeur adjoint du laboratoire PIMIT